Bonjour Rav Chaya
Sur cette page, vous écrivez tout à la fin :
« Dans ce dernier cas, vu que la personne a reconnu qu’elle a fait du mal mais refuse de s’excuser, on a le droit de la haïr ».
A ce sujet, j’aurais aimé savoir :
- Comment concilier ces mots avec le verset :
- Tu ne haïras pas ton frère en ton cœur
(Vayiqra 19,17).
- Tu ne haïras pas ton frère en ton cœur
- Plus largement, quels sont les cas dans lesquels la Halakha autorise-t-elle explicitement à haïr un Juif ?
- Enfin, cette autorisation est-elle une mitsva, ou réellement juste une autorisation, qui ne constitue pas en soi de faute, mais au sujet de laquelle il demeure une midat ‘Hassidouth de ne pas y succomber ?
Merci beaucoup
Réponse du Rav Ron Chaya :
Chalom David,
Voici les réponses à tes questions :
- Il est permis de haïr son prochain une fois qu’on lui a expliqué dans quelle mesure il avait tort de nous faire du mal et qu’il a reconnu cela mais que néanmoins il ne regrette pas ce qu’il a fait.
- Pourquoi ?
Les commentateurs donnent deux réponses :- Étant donné que dans le verset que tu as cité il est écrit à la fois l’interdiction de haïr et l’obligation de corriger son prochain,
la Torah veut nous signifier par cela que les deux sont liés,- et donc à partir du moment où on a corrigé son prochain et qu’il persiste dans son tort,
- ‘interdiction de le haïr disparaît.
- et donc à partir du moment où on a corrigé son prochain et qu’il persiste dans son tort,
- Vu qu’après qu’on lui ait expliqué il persiste dans son tort,
il démontre par cela qu’il a un statut de racha, de mécréant,- et dans cette mesure l’interdiction de le haïr n’existe plus car il est permis de haïr un racha comme je vais l’expliquer dans le point 2.
- Étant donné que dans le verset que tu as cité il est écrit à la fois l’interdiction de haïr et l’obligation de corriger son prochain,
- Pourquoi ?
- Étant donné que le verset dit :
- « Tu ne haïras pas ton frère en tout cœur »,Nous voyons que cette ordonnance ne concerne que celui qui a un statut de frère, or un fauteur n’a pas ce statut.
- Quelles sont les conditions le rendant fauteur et qui ne lui permet plus d’être appelé frère ?Ces 4 conditions réunies :
- Il faut avoir soi-même vu le fauteur faire le péché,
mais si on a seulement entendu qu’il l’a fait, on n’a pas le droit d’y croire et donc pas le droit de le haïr.- Dans certains cas, si on voit des actions chez le fauteur qui corroborent ce qu’on entend à son propos, s’il y a vraiment par cela une preuve qui montre qu’il a effectivement commis le péché dont on l’accuse et qu’il n’y a pas lieu de le juger favorablement
- (caf zekhout (voir plus bas point 3)),
- on a le droit de croire les paroles dites à son sujet et de le haïr.
- (caf zekhout (voir plus bas point 3)),
- Attention, ces choses sont extrêmement fines et délicates, il faudra donc prendre conseil auprès d’une autorité rabbinique compétente.
- S’il s’agit d’un péché fait dans des conditions qui mettent tout le monde au courant de toute façon, on a le droit de croire ce qu’on entend ;
- idem s’il y a des rumeurs incessantes qui courent dans la ville à propos de cette personne,
on pourra y croire car il est impossible que sur le long terme, toutes les personnes de la ville se trompent.
- Dans certains cas, si on voit des actions chez le fauteur qui corroborent ce qu’on entend à son propos, s’il y a vraiment par cela une preuve qui montre qu’il a effectivement commis le péché dont on l’accuse et qu’il n’y a pas lieu de le juger favorablement
- Il faut qu’il ait transgressé un interdit de la Torah pour lequel, à l’époque du Temple, il aurait été passible des 39 coups, c’est-à-dire un interdit fait par une action (et non par la pensée, la parole ou le regard).
- Certains avis disent que même s’il s’est abstenu d’accomplir une loi positive, on a le droit de le haïr ;
- d’autres disent cela même s’il a transgressé un interdit dérabannan,
- mais étant donné qu’il y a un doute à ce sujet, on ne pourra le haïr que dans le premier cas susmentionné
(un individu inconscient des valeurs de la Torah et qui transgresse même des péchés graves de la Torah ne peut pas être considéré comme un racha).
- mais étant donné qu’il y a un doute à ce sujet, on ne pourra le haïr que dans le premier cas susmentionné
- Un individu qui refuse d’obéir à un tribunal rabbinique est considéré comme un racha et on peut le haïr.
- Il n’y a pas de limoud zekhout à faire sur lui,
c’est-à-dire qu’on ne peut pas le juger favorablement d’après les lois de cette mitsva qui sont brièvement les suivantes :- Il n’y a lieu de juger favorablement ou pas que si on a un doute, lorsqu’on voit une personne faire une mauvaise action,
- si effectivement elle est dans son tort, car il se peut que dans certains cas elle ait une raison tout à fait valable d’agir ainsi et nous ne connaissons pas cette raison, donc comment la juger ?
- Si cette personne est qualifiable de bénoni, c’est-à-dire une personne dans la moyenne ce qui signifie qu’elle pratique la Torah mais que de temps en temps elle lui arrive de faire un péché, si on a autant de raisons de la juger favorablement que défavorablement, on a l’obligation de la juger favorablement ; si on a plus de raisons de croire qu’elle a mal agi, on a le droit de la juger défavorablement mais on aura une mesure de piété de la juger favorablement.
- S’il s’agit d’une personne qualifiée de yiré Elo-him, c’est-à-dire qu’elle a la crainte de D., donc un Tsadik qui ne fait presque jamais de péché, on a l’obligation de la juger favorablement dans tous les cas.
- Si cette personne est qualifiée de racha, c’est-à-dire que la majorité de ses actions sont mauvaises, on a l’obligation de la juger défavorablement même si on a plus de raisons de croire qu’elle a bien agi.
- Si on a vu un Talmid ‘Hakham faire un péché, on le jugera favorablement car on est certain qu’il a fait techouva et dans cette mesure, on n’a pas le droit de le haïr.
- si effectivement elle est dans son tort, car il se peut que dans certains cas elle ait une raison tout à fait valable d’agir ainsi et nous ne connaissons pas cette raison, donc comment la juger ?
- On n’a pas l’obligation de juger favorablement une personne à propos de laquelle on ne sait pas si elle est considérée comme une personne cachère, bénoni ou yiré Elo-him,
il n’y aura qu’une mesure de piété à agir ainsi.
- Il n’y a lieu de juger favorablement ou pas que si on a un doute, lorsqu’on voit une personne faire une mauvaise action,
- Informer le fauteur que l’action qu’il fait est vraiment interdite par la Torah.
- S’il s’agit d’un péché dont l’interdiction est archi-connue, *
- inutile de l’en informer car nous sommes certains qu’il est au courant que cette chose est interdite par la Torah.
- S’il s’agit d’un péché entre l’homme et son prochain,
- on ne peut pas le considérer comme conscient car en général la personne n’arrive pas à être assez objective pour comprendre qu’elle fait un péché envers son prochain.
Dans le cadre de cette quatrième condition, il faut aussi faire une tokhékha, c’est-à-dire après que le fauteur ait commis son péché, lui expliquer gentiment, sans lui faire honte, et plusieurs fois (jusqu’à ce qu’il veuille nous frapper ou se fâche contre nous en étant vulgaire) qu’il a tort d’agir ainsi.
- Si le fauteur est un incroyant ou même s’il est croyant mais qu’il n’hésite pas à fauter même lorsqu’il n’a aucun intérêt à cela (par exemple s’il a le choix entre un steak cachère et un steak non-cachère qui ont le même goût et le même prix, et qu’il lui est égal de prendre l’un ou l’autre), il n’y a pas d’obligation de l’avertir ou de lui faire une tokhékha car il a un statut de racha, de mécréant, et par cela il n’est plus concerné par la mitsva de tokhékha.
- Néanmoins, s’il est un tinok ché-nichba, c’est-à-dire une personne qui n’a pas reçu d’éducation religieuse,
- et même s’il en a reçue une mais qu’elle n’était cependant pas suffisamment bonne pour qu’on puisse le considérer comme conscient et donc responsable du péché qu’il a commis,
- il n’a plus le statut de racha et l’obligation de lui faire une tokhékha revient à sa place.
- et même s’il en a reçue une mais qu’elle n’était cependant pas suffisamment bonne pour qu’on puisse le considérer comme conscient et donc responsable du péché qu’il a commis,
- On n’a pas le droit de haïr un enfant qui fait des péchés car il n’a pas conscience de la gravité de ses actions.
- On ne peut pas non plus haïr un pécheur si nous faisons le même péché qu’il transgresse.
- S’il s’agit d’un péché dont l’interdiction est archi-connue, *
- Il faut avoir soi-même vu le fauteur faire le péché,
- Quelles sont les conditions le rendant fauteur et qui ne lui permet plus d’être appelé frère ?Ces 4 conditions réunies :
- « Tu ne haïras pas ton frère en tout cœur »,Nous voyons que cette ordonnance ne concerne que celui qui a un statut de frère, or un fauteur n’a pas ce statut.
- Haïr le fauteur n’est pas qu’une autorisation, il y a une mitsva réelle de le haïr comme cela est écrit dans traité Pessa’him page 113, au nom de Rav Na’hman bar Yts’hak.On apprend cela de trois versets :
- L’un dans Michlé (Proverbes) chapitre 8 verset 13 :
- « Craindre l’Éternel, c’est haïr le mal ;
l’arrogance, le chemin du malfaiteur, la bouche perverse,
voilà ce que je déteste » ;
- « Craindre l’Éternel, c’est haïr le mal ;
- Et les deux autres dans Téhilim chapitre 139 versets 21 et 22 :
- « A coup sûr, je déteste ceux qui Te haïssent,
j’ai en horreur ceux qui se dressent contre Toi. - Je leur ai voué une haine infinie,
je les considère comme des ennemis ».
- « A coup sûr, je déteste ceux qui Te haïssent,
Les commentateurs ont cité trois raisons pour lesquelles il y a une mitsva de haïr le fauteur :
- Le fait de haïr le mal fait partie de la crainte de D.
- Afin de s’éloigner de lui et que les gens n’apprennent pas de son mauvais comportement.
- C’est un moyen de pression sur lui afin qu’il revienne sur la bonne voie.
Il existe un type de fauteur beaucoup plus grave, qu’on a non seulement la mitsva de haïr mais qu’on n’a pas le droit de ne pas haïr, et qu’on n’a pas non plus le droit d’arrêter de haïr !
Il s’agit du messit, c’est-à-dire de la personne qui vient inciter un juif à quitter la Torah ou de ne pas croire à l’un de ses fondements tels que la réalité de D., le fait que la Torah provienne du ciel, qu’elle ait été donnée au mont Sinaï, que les paroles des prophètes soient toutes authentiques, l’obligation de pratiquer toutes les mitsvot même celles dérabannan, qu’il y a une récompense et une punition dépendante de l’application de ses mitsvot, la croyance et l’expectation en l’époque messianique ainsi que la croyance en la résurrection des morts.
Même si le messit est un tinok ché-nichba, c’est-à-dire qu’il est inconscient de la vérité de la Torah, on a toutefois la mitsva de le haïr dans la même mesure.
- L’un dans Michlé (Proverbes) chapitre 8 verset 13 :
Au revoir,
Rav Ron Chaya
Référence Leava : 27624
Date de création : 2013-12-30 10:12:54