Bonjour Rav !
J’aurais une petite objection sur votre cours « la preuve irréfutable » :
Selon Tossefoths (yevamoth 50 a) un prophète, tel qu’on le conçoit dans le judaïsme, ne prédit pas l’avenir, il dit seulement ce qui est apte a se produire (« ma she-raoui liyot »).
Donc comment utiliser une prophétie comme preuve ?
De plus, pas toutes les prophéties qui sont rapportées dans la Bible se sont réalisées :
1/ on avait promis a Yoshiaou de mourir en paix (rois II, 22, 20) et pourtant il mourut a 39 ans assassine en pleine guerre, ce qui provoqua la perte de l’indépendance du royaume de Judah ;
2/ Le prophète Jérémie promet le retour des enfants de Rachel en Israël (Jérémie 31, 15/19), soit les dix tribus, alors qu’au final, non seulement qu’ils ne sont pas retournes en Israël, mais on a complétement perdu leur trace.
Il existe encore d’autres exemples, mais cela devrait suffire dans le cadre épistolaire.
Évidemment, que dans le tas de prophéties que l’on trouve dans la Bible certaines se soient réalisées ne prouve strictement rien.
Je vous remercie pour votre attention, et attend impatiemment une réponse de votre part.
Chalom
Réponse du Rav Ron Chaya :
Chalom Nathan,
Maimonide, au début du chapitre 10 des Hilkhot Yessodé haTorah (alinéa 1), écrit :
« Comment vérifie-t-on si un prophète est un vrai ou faux prophète ? ».
Il répond qu’on lui demande d’annoncer des choses qui doivent se réaliser dans le futur, on attend de voir si ces choses se réalisent ou pas, et si même une petite chose ne s’est pas réalisée, alors on sait que c’est un faux prophète (à l’époque sa sentence était la peine capitale par strangulation).
Il est clair que le prophète ne dit pas « seulement ce qui est apte à se produire » car si c’est le cas, pourquoi le strangulerait-on ?
De plus, dans l’alinéa 3 du même chapitre, Rambam écrit que toutes les paroles du (vrai) prophète doivent se réaliser, comme il est écrit (Rois II 10, 10) :
« Sachez qu’aucune parole de D. (prononcée par la prophète) ne tombera à terre ».
Plus que cela, la Torah elle-même le dit on ne peut plus clairement (Devarim, 18, 22) :
« Si le prophète annonce au nom de l’Éternel une chose qui (pour finir) ne se réalisera pas et n’arrivera pas, cette annonce n’aura pas été dictée par l’Éternel ; c’est avec témérité que le prophète l’a émise, ne crains pas de sévir à son égard »
(en lui donnant la mort – cf. Rachi).
On pourrait encore dire à la rigueur que Tossefot n’est pas d’accord avec le Rambam, mais peut-il ne peut être d’accord avec la Torah ?!
En fait, tu n’as pas très bien compris les paroles du Tossefot Yebamot page 50a.
Tossefot ne dit pas simplement comme tu m’as écris que le prophète ne prophétise que « ma ché-raouy lihyot » c’est-à-dire ce qui est apte à se produire, mais, pour reprendre les paroles du Tossefot, « ma ché-raouy lihyot im lo haya ‘hoté« , c’est-à-dire ce qui est apte à se produire s’il n’avait pas péché.
On parle du cas spécial de la prophétie concernant ‘Hizkiyahou où Tossefot dévoile que cette prophétie était sous condition.
C’est-à-dire que si ‘Hizkiyahou ne péchait pas, ALORS voici ce qui se serait réalisé.
C’est comme je l’explique dans le cours « La preuve irréfutable » :
le prophète donne deux scénarii possibles : le bon et le mauvais, et il conditionne la réalisation d’un de ces deux scénarii par le comportement d’une personne ou du peuple.
Dans le cas de la prophétie de ‘Hizkiyahou, cela dépendra de la personne (du roi ‘Hizkiyahou), dans le cas des prophéties de Ki Tavo du Deutéronome 28, cela dépendra du comportement du peuple d’Israël.
Dans tous les cas, un des scénarii sera caduc vu que les deux ne peuvent pas se réaliser ensemble.
La preuve irréfutable que nous pouvons tirer des prophéties réside dans le fait qu’une fois qu’elles ont commencées, c’est-à-dire qu’il est clair que la Providence a choisi que se réalise l’un des deux scenarii potentiels plutôt que l’autre, elles se réalisent d’après tous les nombreux détails cités de la prophétie, sans qu’il y ait même une petite chose qui ne se réalise pas.
Ce n’est pas toujours que les prophéties sont sous conditions, mais c’était le cas chez ‘Hizkiyahou.
Il ne faut pas te méprendre sur le sens du mot « raouï » (apte) qu’emploie le Tossefot, ce terme concerne la prophétie au moment où elle est faite, c’est-à-dire au moment où la personne concernée n’a pas encore opté d’après son comportement pour l’un des deux scenarii, donc chaque scénario n’est qu’un potentiel, donc n’est que « raouï » (c’est pour cela qu’il est important de lire ce mot avec la suite : « im lo haya ‘hoté »).
Mais il est clair que Tossefot n’a pas la moindre intention d’aller à l’encontre des paroles du Rambam, et encore moins de celles de la Torah, qui font partie des bases mêmes des lois de prophétie.
A propos de la prophétie concernant Yochiyahou (Roi II chap. 22 verset 20), tu n’as pas compris le sens de cette prophétie.
Regarde sur place, absolument tous les commentateurs expliquent très bien qu’il mourra en guerre ; simplement, comme le dit le texte en hébreu « vé-nééssafta el kivrotékha Be Chalom – tu seras amené dans ton tombeau en paix ».
Non que tu mourras en paix, tu ne seras pas enterré dans les champs ou dans un pays étranger mais bien dans le tombeau de tes pères.
Rachi explique aussi que ce « Be Chalom – en paix » signifie « tu mourras avant de voir la destruction du temple ».
A propos de la prophétie concernant les 10 tribus, je ne vois pas pourquoi tu dis qu’elle ne s’est pas réalisée.
Béezrat Hachem quand Machia’h viendra, elle se réalisera.
D’ailleurs, à ce titre, tu peux consulter le livre « Les tribus d’Israël » du Rav Avih’ail qui montre qu’elles existent encore et béezrat Hachem, elles reviendront très bientôt dans le sein du peuple d’Israël.
Je te rappelle que le Chout haRedbaz dit il y a déjà 500 ans que les falashas sont la tribu de Dan.
Pour plus de détails, je te renvoie à ce livre.
J’attends tes remarques si nécessaire.
Au revoir,
Rav Ron Chaya
Référence Leava : 8381
Date de création : 2010-02-09 15:02:28
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